Fantastic Ukrainian Freedom Tour


Pas de vacances pour la guerre en Ukraine. Pour le crier au monde, les musiciens réfugiés de ce pays meurtri, réunis en orchestre symphonique, ont entamé fin juillet  un tour d'Europe qui se terminera aux USA. Seule halte de l'Ukrainian Freedom Tour, en  France, après Varsovie, Londres et Munich  c'était hier soir 2 août au Théâtre antique d'Orange, avant de continuer sur Berlin, Édimbourg, Amsterdam, Hambourg, Dublin, New-York et Washington le 20 août. Pour ce concert de solidarité, entièrement gratuit, les musiciens ont choisi des compositeurs européens  : Sylvestrov, Chopin, Beethoven et Brahms. Sur les gradins, malgré plusieurs milliers de personnes, les nombreuses places vacantes font tâche, la solidarité aurait-elle déjà pris congé ?  Malgré le drame qui les mine, les quelque quatre-vingt musiciens se sont investis totalement, unis dans le malheur et dans la joie d'être ensemble. Cette force invisible s'est traduite dans leurs vives interprétations, jouées dans l'urgence de leur message d'espoir et de paix.

La 7ème symphonie de leur compatriote Valentin Sylvestrov, longue plage extatique, entrecoupée de sursauts, aux parfums d'un Mahler délivré de ses angoisses, en a dérouté plus d'un. Mais pas autant que Tikhon Khrennikov, gardien des positions dogmatiques de l’Union des Compositeurs soviétiques, héritées de l’ère stalinienne, qui l'interdit de publication dans les années 60. Aujourd'hui à 85 ans, le compositeur de renommée mondiale, devant les horreurs de la guerre, a été obligé de fuir l'Ukraine et se réfugier à Berlin. Jouer avec foi et maîtrise sa 7ème symphonie, quel bel hommage de ces jeunes musiciens ukrainiens à ce combattant de la liberté qui, comme Chostakovitch, aura été victime du délire d'une censure omniprésente. 


La pianiste ukrainienne, Anna Fedorova, se démarque des poncifs habituels dans son interprétation du 2ème concerto pour piano et orchestre de Chopin. Son piano chante, s'éloigne de la virtuosité gratuite, fuit les effets superflus, adoucit les aigus, fluidifie les gruppettos. Moment magique, le larghetto, lyrique à l'extrême sous les battements des violons, fait chavirer les cœurs. 


Le public vibre à nouveau avec la soprano Ukrainienne Liudmyla Monastyrska, admirable dans un court extrait de l'opéra Fidelio de Beethoven, hymne à l'amour et à la liberté.  


Enfin,  l'incomparable beauté de la 4ème Symphonie de Brahms, sous la direction incisive et enthousiaste  de la cheffe Keri-Lynn Wilson, dans des tempis très allants, agite l'opulence de l'orchestre, réveille ses cuivres flamboyants, aère ses cordes fiévreuses et passionnées. 


Le public a reçu ce concert comme un cadeau, avec émotion, mais aussi avec la joie des moments partagés. Les larmes ont envahi leurs yeux, quand debout avec l'orchestre, ils ont entendu une version orchestrale, douce et touchante, de l'hymne national Ukrainien. Le mur du théâtre antique, bleu et jaune, a pleuré avec nous.






A noter. Le concert sera diffusé sur France Musique, lundi 15 août à 20 h. Il est maintenant disponible en podcast.

 






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