Festival Liszt en Provence : Irina Lankova suspend le temps Schubertien et fait tonner Rachmaninov et Scriabine

 


Un petit vingt degrés et du vent froid ont eu raison du concert sur la terrasse du château St Estève, ce dimanche soir. C’est donc dans l’Orangerie que le fidèle public du festival s’est retrouvé pour entendre le récital Scriabine, Chopin, Rachmaninov et Schubert-Liszt d’Irina Lankova. La pianiste Belge née en Russie a toutefois dû, et su, s’adapter à l’autre piano Fazioli d’intérieur, au toucher différent, et dans une acoustique plus intimiste. Après des fortissimi que l’Orangerie avait du mal à contenir dans les brillants préludes et le dramatique presto du Moment musical op.16 de Rachmaninov, la seconde partie fut mieux adaptée au lieu. Les cinq courts préludes de Scriabine, éthérés et poétiques faisaient suite à l’étude N°5 (Affanato), dans laquelle Irina Lankova donnait libre cours à une bouillante virtuosité. Belle sérénité chez Chopin dans le radieux nocturne opus 72 et dans le poignant largo du prélude op.28 dans lequel la main gauche égrène des sanglots. En revanche, le discours de la première Ballade, malgré un beau chant et un développement passionné, aboutit à un presto con fuoco précipité, à la limite de la lisibilité. Irina Lankova retrouve l’air pur avec l’impromptu D.899 de Schubert, dans le chemin d'une mélancolie sensible et agitée. De même, la beauté de son toucher dans les deux lieder de Schubert, (Ständchen et Auf dem Wasser) version Franz Liszt, suspend le temps, dans une atmosphère poétique et limpide. Deux bis contrastés achèvent ce voyage au pays des génies : le paisible adagio de Marcello/Bach et la fougueuse étude pathétique de Scriabine, illuminée, haletante et cinglante. Du grand art.

 

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