Chorégies : Tosca attachante, dans une version scénique originale et spontanée


C’est avec Tosca de Giacomo Puccini que s'achevaient lundi soir les Chorégies d’Orange. Cet unique opéra du festival lyrique orangeois, programmé en version de concert pour la première fois cette année, célébrait à sa manière le centième anniversaire de la disparition du prodigieux compositeur, fin novembre 1924. 


Malgré l’absence de mise en scène annoncée, la superbe distribution composée notamment de Roberto Alagna (Mario), Aleksandra Kurzak (Tosca) et Bryn Terfel (Scarpia) a déplacé les foules. Le Théâtre antique était plein comme un œuf…d’autruche, avec sept mille personnes bon poids et quatorze mille oreilles tout ouïe, gênées par un mistral qui flirtait avec les 70 km/h, et ça décoiffait tout en haut des gradins.


Dès les premières mesures, l’effet Puccini se déploie, l’atmosphère lourde saisit les Chorégiens. Tout de suite on comprend qu’il ne s’agira pas seulement d’une version de concert stricto sensu. Pas de metteur en scène à l’affiche, et pourtant… Pétris de leur expérience de mille mises en scène, totalement investis dans leur rôle, les artistes jouent à plein, mus par un sens profond de complicité et l'irrépressible envie de vivre leur personnage, à fond.


Uniformément de noir vêtus, sauf Tosca en robe claire, ils offrent plus qu’une simple mise en espace. Avec pour seule scénographie le mur incomparable du Théâtre antique, coloré et imagé par Vincent Cussey, offrant tous les possibles. Pour toute mise en action, l’improvisation est seul guide, selon l’aveu même des protagonistes. Et cela fonctionne à merveille. Le résultat est remarquable. Et si c’était l’avenir ? se questionnent certains devant la multiplication de cette forme de représentation scénique.  


Les Chorégiens ont plébiscité la soprano Aleksandra Kurzak, Tosca amoureuse, combative et émouvante, parfaite dans Non la sospiri, la nostra casetta du premier acte, puis au deuxième, dans un Vissi d’arte purement miraculeux, s'effaçant dans un filet de voix, largement applaudi. Les fidèles Chorégiens ont retrouvé les couleurs de “leur” Roberto lors du célèbre “E lucevan le stelle”, un temps baptisé pensionnaire des Chorégies tant sa présence était fréquente. Malgré quelques moments où sa voix s’éraille, ses envolées ravissent. Ses fans applaudissent à tout rompre. Tous deux explosent vocalement et scéniquement face à la cruauté du libidineux Scarpia, dont Bryn Terfel, dans des éclats furieux, sait en révéler toute la noirceur. Sans oublier les excellents Jean-Vincent Blot (Angelotti), Marc Barrard (le sacristain), Carlos Natale (Spoletta), Jean-Marie Delpas (Sciarrone) et Galia Bakalov (un berger).


La cheffe Clelia Cafiero, révélée au public dans Carmen lors des Chorégies 2023 a su, de nouveau, soulever l'enthousiasme du public et guider d’une baguette, enveloppante et vive, les excellents artistes de l’orchestre Philharmonique de Nice, des Choeurs d’Avignon et des Chorégies d’Orange. 


Avant le retour, annoncé par le directeur Jean-Louis Grinda, à deux opéras l’an prochain, dont un Verdi, cette édition 2024 marquée par les intempéries, aura été l'occasion de découvrir une attachante Tosca dans une version scénique originale et spontanée. 





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