Chorégies : Bertrand De Billy, l'ONF et CédricTiberghien, embrasent le Théâtre Antique


Ovation debout. Le public subjugué et enthousiasmé par la symphonie du Nouveau Monde d'Antonin Dvorak, interprétée par l'Orchestre National de France dirigé par Bertrand de Billy, ne veut pas quitter les gradins. La foule applaudit en cadence, redouble tant et si bien qu'après plusieurs rappels le chef décide de redonner en entier le dernier mouvement de la symphonie, au thème célébrissime. Le public est aux anges.



Un engouement qui puise sa source dans l’œuvre elle même dont le pouvoir de séduction reste intact, depuis sa création à New-York en 1893... Pouvoir des mélodies, des rythmes, de l'harmonie, de l'orchestration et de l'interprétation. Sublimée par les musiciens du National qui, tour à tour, donnent le meilleur : le cor anglais dans le magnifique largo, les flûtes, clarinettes et hautbois, le quatuor de cors, omniprésent jusque dans les dernières mesures, les trombones, le timbalier, sans oublier toutes les cordes, traduisant à chaque mouvement l'atmosphère unique de ce nouveau monde étonnant. Pouvoir du chef, s'attachant ici à faire chanter les instruments comme il s'est attaché à faire chanter les artistes du Trouvère. Bertrand de Billy aime les musiciens, aime la musique et, dès lors, sa direction sobre, mais précise et communicative, libère les énergies, favorise l'expression de chacun dans une harmonie claire et aérée.



En première partie du concert, l'ouverture d'Oberon de Weber, truffée de contrastes, donnait à entendre des cordes chantantes et des tutti joyeux. Pour suivre, le concerto pour piano de Ravel, œuvre magique et vivifiante, apporte sont lot d'émotions fortes. Le pianiste Cédric Tiberghien refuse le tout motorique et opte pour le tout poétique, tant mieux. Les tempis sont modérés et l'expressivité extrême. Le grand adagio central plonge l'auditoire dans une douce rêverie, le piano débute seul, longuement, doucement puis dialogue avec les flûtes, hautbois et clarinettes, puis avec l'orchestre dans des harmonies étranges, avant de terminer avec le cor anglais, un vrai et pur régal.



Après la course presto du finale, au rythme effréné, les Chorégiens multiplient les rappels. Cédric Tiberghien revient seul. Le chef s'assoit parmi les musiciens pour l'écouter. Vient alors un bis fabuleux, la Cathédrale engloutie de Debussy, extraite du premier livre des Préludes, inspirée par la légende bretonne de la ville d'Ys submergée par les flots. Le pianiste, courbé sur son clavier, fait plonger le théâtre antique dans un moment d'extase unique. Point de virtuosité gratuite, seulement des sonorités fluides, des blocs d'accords doux et humides, des graves profonds, des aigus cristallins, dans des tonalités irréelles. Le temps est suspendu dans le doux soir d'été, des instants inoubliables.



Commentaires