“ C’est une bête de scène ” s'exclamait, enthousiaste, une fan du violoniste Nemanja Radulovic qui a enflammé le Théâtre antique, vendredi soir, avec son orchestre Double sens, constitué en 2008. La foule de plus de 1500 admirateurs a multiplié les rappels, ne voulant pas laisser partir la barock star. Par trois fois il est revenu souriant, multipliant les gentillesses, dans son look indéfinissable où le noir domine comme le chignon emprisonnant une partie de ses longs cheveux. Tour à tour pour ces moment de grâce, le public s’est délecté d’une chanson populaire interprétée par la première violon de l’Orchestre de Belgrade, d’un morceau du folklore des Balkans et d’un extrait de la fameuse Czardas de Monti, jouée également lors de Musiques en fête.
Incontestablement
Nemanja Radulovic est un grand virtuose du violon, avec une technique
prodigieuse qui fascine. Sa façon d’accentuer les points forts des rythmes là
où on ne les attend pas, de dynamiser des œuvres connues leur donnant une
nouvelle vie, d’utiliser un rubato savamment dosé pour mieux emporter le public
avec lui dans ses tempi, est réellement sa marque de fabrique. Voilà pourquoi
la Nemanja mania fait fureur !
Le concert débutait
par l'œuvre classique à programme certainement la plus connue au monde, Les
quatre saisons d’Antonio Vivaldi, compositeur, violoniste, mais également
prêtre vénitien. Composée de quatre concertos comportant trois mouvements (vif,
lent vif) chacun, c’est une véritable ode à la nature. Quand on connaît
l’acoustique exceptionnelle du Théâtre antique où une petite flûte s’entend
aisément dans les moindres recoins du théâtre, on peut s’étonner de
l’artillerie employée pour amplifier tous les instruments. Difficile dans ces
conditions de reconnaître la finesse du son du violon de Nemanja Radulovic,
épaissi, boursouflé, déformé, par une technique inutile. Mais cela n’a pas
empêché le public de voyager avec délices dans ces quatre saisons étonnantes,
où l’inventivité des musiciens fait merveille.
Le public était
ensuite invité à partager l'œuvre contemporaine du compositeur Serbe Aleksandar
Sedlar : Spring in Japan : “ nous étions
au Japon il y a dix ans quand le tsunami est arrivé, cela nous a impressionnés,
nous avons souhaité faire quelque chose pour les victimes, cette œuvre a été
composée en leur mémoire “ précise l’artiste. Plongée immédiate dans
l'univers des modes tonaux japonais, avec leurs gammes spécifiques. Il s’en
dégage une atmosphère de printanière, de calme et de sérénité où le grave du
violon incite à la rêverie, bientôt troublée par les grondements glaçants du
tsunami dévastateur. Après quelques mesures de presque silence au violon solo,
la vie reprend sur un rythme effréné. Cette page évocatrice impressionne par
l’engagement de tous les artistes, unis dans une même célébration.
Enfin, le show
bouillant de Nemanja et consorts s’est achevé avec une adaptation de
Shéhérazade de Nikolaï Rimsky Korsakov. Dans un savant arrangement d’Aleksander
Sedlar le violon occupe la place du conteur, évoluant avec fougue dans les
thèmes successifs évoquant Shéhérazade et le Sultan. Une occasion rêvée de
faire plaisir à ses fans, entraînés dans le tourbillon sans fin du rythme et de
la virtuosité.
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